• Ei tuloksia

Nous allons commencer par la discussion des expériences liées à l'écoute de ces variétés de la langue française qui ont entouré les participants pendant leur séjour. Dans le do-maine des études à l’étranger, il a été constaté que les périodes d’études à l’étranger amé-liorent la confiance et la performance d’écoute des participants, avec des résultats variant de modestes à significatifs. (Isabelli-García et al. 2018 pour un résumé récent des études sur le développement de l'écoute à l'étranger ; Tanaka et Ellis 2003) C’est le même cas avec notre étude. L'exposition abondante au français parlé sous diverses formes et situa-tions a été l'une des expériences les plus significatives rapportées par les participants. Au début de leur séjour, la plupart des participants ont éprouvé des difficultés à traiter et à interpréter l’input orales en français, mais l'exposition et les interactions continues leur ont permis de se familiariser avec une grande partie du vocabulaire de base utilisé dans leurs interactions et situations d'écoute quotidiennes. Le groupe A, constitué de novices en séjour de longue durée en zone francophone, a rapporté une amélioration significative de leur traitement cognitif à l'écoute et un passage d'un traitement contrôlé à un traite-ment plus automatique du flux sonore.

Même si la présente étude s’intéresse davantage à l'expérience globale de l'écoute dans une langue étrangère, les difficultés décrites par les participants présentent des simili-tudes avec des ésimili-tudes antérieures portant spécifiquement sur les difficultés de compré-hension orale. À l'instar de l'étude de Laakso (2015) sur les difficultés d'écoute des ap-prenants de finnois langue seconde, les participants à notre étude ont signalé avoir éprouvé le plus de difficultés en raison de la rapidité du débit, des variétés de langues inconnues, des caractéristiques de la langue parlée et des mots peu familiers. De plus, les participants à cette étude ont déclaré avoir utilisé leurs connaissances générales du monde et leurs connaissances du sujet pour compenser leurs difficultés d'écoute. Dans l'étude ultérieure de Laakso sur l'influence des processus de mémoire de travail sur les difficultés d'écoute (2018) ainsi que dans l'étude de Goh (2000) sur les causes des diffi-cultés d'écoute, un défi commun pour les participants était de trop se concentrer sur le décodage du nouveau matériel entrant qui a résulté dans le fait d’oublier ce qui a déjà été entendu. Cette attention sur le nouveau matériel a également gêné l'analyse du matériel précédent. Ces difficultés sont notamment liées au décodage de nouveaux éléments de

92

vocabulaire ou de sections de discours qui, dans la langue parlée, reçoivent une pronon-ciation différente des attentes basées sur les formes écrites. Ces deux difficultés étaient très fréquentes dans les situations d’écoute de nos participants au début de leur séjour.

Laakso (2018) a également rendu compte de l'influence des pratiques culturelles sur les attentes sur la manière dont les gens devraient agir dans des situations spécifiques. De même, nos participants ont noté que les différences de compréhension culturelle étaient une source d'incertitude et de mauvaise interprétation.

Interrogés sur leur pratique d'écoute antérieure dans l'enseignement formel, de nom-breux participants ont déclaré souhaiter avoir eu la chance de pratiquer davantage d'exercices imitant les besoins dans la vraie vie en classe. Selon eux, les exercices d'écoute devraient inclure une écoute plus interactive afin de nécessiter l'utilisation de compé-tences pour se faire comprendre et de compécompé-tences pour vraiment comprendre leur par-tenaire sans s'appuyer sur des citations prédéterminées souvent utilisées dans des exer-cices d’écoute interactive. Le souhait d’avoir eu la chance de traiter du matériel plus au-thentique et de devoir résumer le contenu en fonction de sa propre compréhension a été exprimé à plusieurs reprises. Ces souhaits sont compréhensibles, car l’expérience de l’écoute interactive reçue pendant leurs études en Finlande de les avait fournis suffisam-ment pour leurs nécessités réelles en mobilité. Plusieurs participants ont dû créer leurs propres stratégies pour gérer leur performance d’écoute pendant leur séjour en partici-pant à des interactions et à des cours en français.

Une autre divergence significative remarquée par nos participants entre le français qu'ils avaient appris dans les classes en Finlande et les variétés du français qu'ils devaient com-prendre dans leur contexte quotidien en mobilité concernait l'argot. Cette variété décrite par les participants comprend probablement des éléments de l’argot, du verlan et de la langue parlée en général. Même si le français standard qu'ils avaient appris en Finlande les a bien servis dans leurs études et aussi dans leurs relations avec d'autres étrangers, ils n'avaient pas la compétence linguistique du français parlé informel utilisé par leurs pairs locaux. Ils ont réalisé qu'ils n'avaient pratiquement aucune expérience préalable de cette variété pendant leurs études de français en Finlande. Beaucoup de participants se sont trouvés profondément dépourvus de compétences linguistiques qui leur auraient permis d'interagir plus pleinement avec leurs pairs français malgré leurs efforts pour

ac-93

quérir rapidement des éléments de cette variété linguistique. Cela marque une expé-rience significative de compétences d’écoute insuffisantes en français dans un groupe so-cial essentiel. Juan et Zhihong (2018) ont décrit des expériences similaires chez des étu-diants chinois de français langue étrangère. Ils écrivent : « Malgré leur maîtrise du fran-çais standard, ils ont du mal à suivre les conversations informelles entre les natifs, dans lesquelles apparaissent de nombreux mots et expressions issues des registres langagiers non standards. » (132) S’appuyant sur la recherche antérieure, Juan et Zhihong postulent qu’il s’agit d’un problème bien connu depuis une trentaine d’années.

Ces résultats sont également conformes aux résultats de Kaypak et Ortaçtepe (2014) dont les participants ont également eu des difficultés à interagir avec leurs pairs ayant la langue cible comme langue maternelle. Cependant, dans les deux études, les participants ont signalé une amélioration significative de leur auto-efficacité en communication mal-gré des difficultés avec des locuteurs natifs. D'autres utilisateurs non-natifs de la langue cible ont été signalés comme des interlocuteurs plus faciles que les locuteurs natifs. Cela était dû au partage d'un réservoir plus similaire de connaissances linguistiques de la langue cible avec le premier groupe.

Outre les difficultés, de nombreux participants ont fait état des gain significatifs sur leur compréhension auditive grâce à leur travail accru sur leur acquisition du français pen-dant leur séjour. Certains participants ont mentionné l’importance de trouver un équi-libre entre ses compétences linguistiques (lire, écrire, parler, écouter) et d’améliorer sa compréhension grammaticale et son vocabulaire. Cependant, lorsqu'ils ont été interrogés sur l'apprentissage de l'écoute, les participants ont donné des réponses plus conformes à

« l'approche de plus pratique » (Graham et al. 2014). Selon eux, l'exposition semble être le principal remède aux difficultés d'écoute. Comme la plupart des participants ont clai-rement été des auditeurs très talentueux dans leur carrière d'écoute et encore plus moti-vés à continuer malgré les difficultés, il est clair qu'ils ont su résoudre leurs problèmes d'écoute par eux-mêmes en inventant des stratégies efficaces au fur et à mesure de leur séjour. Cela est évident dans plusieurs de leurs courts récits où ils expliquent comment ils ont pu gérer des situations de communication difficiles et comment ils ont introduit et orchestré plusieurs outils et stratégies différents pour réussir.

94

De façon générale, les participants du groupe A ont signalé une amélioration plus signifi-cative de leur capacité d'écoute que les participants du groupe B. Cela suivit les résultats de Beattie et al. (2014) qui ont observé des gains de performance d'écoute plus élevés pour les apprenants moins avancés que pour les apprenants plus avancés de l'anglais comme langue étrangère pendant leurs études à l'étranger. De même, les participants du groupe A de notre étude ont souligné l'amélioration de leur capacité d'écoute pendant la période d'étude à l'étranger tandis que les participants du groupe B ont décrit leur déve-loppement plus subtilement. Evidemment, les participants du groupe B avaient déjà vécu dans leur vie une immersion à long terme dans un contexte francophone, ce qui, à leur avis, avait déjà amélioré leur confiance et leur performance d'écoute d’une manière signi-ficative.